Ugine, une ruée vers l’acier - François Deladerrière

Usimages Deladerriere BD 01« J’ai toujours été intrigué par ces usines que la route longe, lorsque l’on prend la direction de Megève ou de Saint-Gervais, juste avant de s’engouffrer dans les gorges de l’Arly. D’un côté, des maisons d’ouvriers en pierre, toutes semblables ou presque. De l’autre, ces usines dont les cheminées fument jour et nuit. En hiver, lorsque la lumière directe du soleil n’atteint plus le fond de la vallée, l’ambiance presque pesante des lieux aiguise mon imagination. Et si l’on passe de nuit, on voit luire les fours en marche par les portes ouvertes des ateliers.


Je ne me doutais pas qu’un jour j’aurais l’occasion de pénétrer au sein de l’une de ces usines, et de l’arpenter jusque dans ses moindres recoins. Passée la curiosité de pouvoir enfin découvrir ces lieux, cette commande photographique* m’a permis de rencontrer une communauté. Celle des centaines d’hommes et de femmes contribuant à faire vivre cette grande masse organique qu’est une aciérie.
On m’a accompagné, expliqué avec passion le fonctionnement de chaque atelier, de métiers dont je n’aurais jamais soupçonné la complexité, ni la diversité. J’ai découvert les laboratoires, les bureaux d’études, appris toutes les étapes nécessaires à l’élaboration des inox.
Je pensais qu’il serait délicat de pénétrer avec ma chambre photographique dans cet univers. Car il peut paraître incongru de traquer la beauté dans un lieu destiné à la production.
Pourtant, j’ai eu l’occasion d’échanger avec les employés de l’usine à propos de la dimension esthétique du lieu. Je crois même que la fierté qu’éprouvent beaucoup de ceux avec qui j’ai pu parler provient du fait que cette usine recèle non seulement une histoire mais une atmosphère difficilement imaginable et, de fait, réellement belle.
Photographier un espace d’une telle dimension en quelques semaines impose des choix.
J’ai tenté du mieux que j’ai pu de restituer les ambiances, les rencontres. La sélection des images a été difficile et cruelle car j’ai dû laisser dans l’ombre des pans entiers de choses vues, dans la ville comme dans l’usine. J’espère néanmoins que les quelques clichés ici rassemblés donneront un juste aperçu de l’expérience que j’ai pu vivre, et que les ouvriers et les habitants d’Ugine, que je remercie encore pour leur accueil, y retrouveront leur usine et leur ville ».

* Commande de la Fondation Facim sur la ville et les aciéries d’Ugine en Savoie.

Né en 1972, François Deladerrière vit et travaille à Arles.
Diplômé avec mention de l’école nationale supérieure de la photographie en 1999, il est représenté par la Galerie Le Réverbère à Lyon.

www.francoisdeladerriere.com

Du 4 avril au 31 mai l Cinéma 60160 Montataire l Hall d’accueil